Pourquoi le triangle de l’amour possède 7 côtés ?

Illustration de de la triangulation amoureuse (théorie du psychologue américain Robert Sternberg)
Sommaire

« L'amour est un oiseau rebelle

Que nul ne peut apprivoiser

Et c'est bien en vain qu'on l'appelle

S'il lui convient de refuser

Rien n'y fait menace ou prière

L'un parle bien l'autre se tait

Et c'est l'autre que je préfère

Il n'a rien dit mais il me plaît »

Georges Bizet

L'amour, c’est à n’y rien comprendre. Oiseau rebelle, il nous surprend quand on ne l’attend plus. Soit qu’il nous emporte, soit qu’on le force à peine perdue, il se montre rarement docile, souvent turbulent, buté… voire cruel. Réputé irrationnel, inexplicable, il s’impose pourtant à nous comme une évidence contre laquelle lutter est vain.

Mais l’amour est aussi un sentiment complexe, protéiforme. Il nous arrive à tous de passer par des moments de doute, spécifiques à différentes époques de notre vie amoureuse, où l’on se demande par exemple :

  • « Est-ce que je l’aime ? Est-ce seulement amical ? Ou alors, c’est plus qu’une simple amitié ? ».
  • « Je désire cette personne physiquement, mais je n’en suis pas amoureux. Est-ce que c’est mal ? Est-ce que je la trahis ? »
  • « Je pense que j’aime une personne, je veux être tout le temps avec elle, tout faire avec elle, tout partager… mais je ne veux pas m’engager. Cela veut-il dire que je ne l’aime pas vraiment ? »
  • « Je suis engagé avec mon ou ma partenaire, on a des enfants, mais je n’éprouve plus de passion… où est l’amour dans tout ça ? Est-ce que notre relation a encore un sens ? »

Poètes, romanciers, scénaristes, philosophes, psychologues, coachs en tous genre et bientôt l’intelligence artificielle, tous s’évertuent, d’aussi loin qu’on se souvienne, à trouver les clefs du sentiment amoureux, si unique, pour le comprendre, l’expliquer, et pourquoi pas même, le rationaliser, bref, pour nous rassurer sur ces questions universelles.

Dessin du triangle amoureux

Dans cet article, nous voudrions vous parler d’une théorie de l’amour. Une théorie parmi des centaines nous direz-vous, mais qui a au moins le mérite de nous aider à mettre un peu d’ordre dans nos différentes relations, de nous donner, pensons-nous, quelques clefs pour répondre à ces questions.

Il s’agit de la théorie du psychologue américain Robert Sternberg, dite de la triangulation amoureuse. Voici un beau triangle amoureux, dessiné par notre May à nous, notre designeuse, blogueuse et illustratrice, à qui nous consacrons un article (mais il faudrait un roman) dans notre newsletter à venir (restez avec nous, vous ne serez pas déçus du voyage !).

Les 3 composantes de l’amour :

La théorie de Sternberg repose sur trois composantes principales : l’intimité, la passion et l’engagement. Définissons chacune d’elle :

L’intimité

L’intimité (au sens non sexuel du terme) est la composante affective d’une relation. On se sent proche, lié à l’autre de manière unique. L’interdépendance, sans être excessive, est réelle et positive. L’autre est un soutien et nous sommes un soutien pour lui. On se comprend, on se connaît, on a des souvenirs communs et une confiance mutuelle qui nous aident à avancer à nous sentir bien dans la vie.

La passion

La passion est un mélange d’attraction physique et psychologique inhabituelle, puissant et total pour une personne. On veut être avec la personne le plus possible, tout partager avec elle, se donner à elle, aussi bien physiquement qu’émotionnellement et intellectuellement. La passion amoureuse nous met dans un état d’euphorie en présence de l’autre, et de manque en son absence. La passion n’est pas quelque chose de raisonné, mais une émotion inarrêtable. Prenez, comme l’un des exemples les plus extrêmes, Roméo et Juliette, prêts à braver l’inimitié meurtrière de leurs familles respectives pour ne serait-ce qu’être en présence l’un de l’autre… choisissant finalement le suicide pour s’assurer d’être ensemble pour l’éternité.

L’engagement

L’engagement désigne deux choses. D’abord, la volonté de poursuivre la relation au-delà de la période de l’amour passion. Ensuite, plus qu’une simple volonté, la traduction en actes et en comportements concrets de cette volonté initiale. L’engagement nous lie, et en ce sens aussi nous oblige à l’égard de l’autre. Il nous oblige moralement à une forme d’exclusivité, comme aux aspects parfois contraignants d’un projet commun à long terme. « Éternellement, pour le meilleur et pour le pire » comme on dit.

Les 7 types d’amour :

Robert Sternberg identifie alors toutes les combinaisons les plus pertinentes de ces trois composantes, pour définir sept types d’amour différents.

L’amitié

Une relation amicale repose sur la seule composante de l’intimité. Point d’attirance physique, ni aucune volonté de s’engager dans une relation exclusive et sur le long terme. Simplement une affection sincère pour l’autre. La relation est porteuse. On partage beaucoup de choses, on est complice. La relation est généralement stable, durable, parce que ne viennent la déstabiliser aucune des problématiques associées à la passion amoureuse, à l’envie d’exclusivité ou au désir sexuel.

L’amour entiché

Passion, passion et… passion : c’est le coup de foudre, l’amour qui rend aveugle. Ni intimité particulière, encore moins d’engagement. On est au tout début de la relation. On se connaît peu, moins qu’avec la plupart de nos amis. On est à mille lieues encore de se projeter dans un projet de couple exclusif et à long terme. Mais on se désire. On se manque. On veut se voir, se donner à l’autre dans des échanges sexuels intenses.

L’amour vide

L’amour vide renvoie à une relation fondée sur la seule composante de l’engagement. Les partenaires n’éprouvent aucune passion amoureuse. Ils n’ont pas cette intimité qui fait la saveur d’une relation amoureuse, qui donne l’envie d’être avec l’autre, de communiquer, de partager avec lui. Tout repose sur l’engagement, une forme d’obligation contractuelle. On retrouve ce genre d’amour vide dans le cas des mariages arrangés par exemple, ou encore lorsque les partenaires vivent depuis longtemps ensemble, sont engagés par un projet familial, mais ne communiquent plus, ne partagent plus.

L’amour romantique

Ici, l’intimité et la passion jouent de concert. Au-delà de la seule passion, du seul désir sexuel, on ressent l’envie de passer du temps avec l’autre, d’apprendre à se connaître, de partager des moments uniques ensemble. On apprend à se faire confiance. Bien que l’engagement ne soit pas encore essentiel à ce type de relation, on ressent un besoin naissant et grandissant d’exclusivité. Ce type d’amour est généralement précurseur d’une relation plus durable.

L’amour complice

C’est l’amour platonique par excellence. Composé d’intimité et d’une volonté sincère d’engagement, il est par contre dénué de toute forme d’attirance sexuelle. Ce type de relation se retrouve dans des relations fondées sur la confiance, la complicité et sur une mémoire commune si importante dans nos vies, qu’on ne peut se projeter en couple avec personne d’autre. Le sens de notre vie est d’être avec notre « plus grand(e) ami(e) », peu importe la question du désir physique. On peut penser à un couple de personnes âgées, bien entendu, mais également à des couples plus jeunes, qui n’éprouvent pas un besoin particulier de relations sexuelles ou qui satisfont ce besoin avec d’autres partenaires, avec qui par exemple ils entretiennent des relations purement sexuelles.

L’amour admiratif

Aussi appelé « amour fou », il se compose de passion et d’engagement, mais pas d’intimité. Les partenaires sont passionnément amoureux l’un de l’autre mais se connaissent peu. Leur relation commence par un coup de foudre, par un sentiment d’évidence qui les conduit sans délai à se promettre l’un à l’autre pour l’éternité. Roméo et Juliette qui, sitôt foudroyés d’amour font vœu de se chérir jusqu’à la fin des temps en sont un bon exemple.

L’amour consommé

Aussi appelé “amour accompli”: c’est l’amour triangulaire dans son entier, composé des trois composantes : passion, intimité et engagement. Il peut y avoir des hauts et des bas. La proportion de chacune des trois composantes peut varier au cours de la relation. Mais elles sont toutes les trois présentes, renouvelées au fil du temps, et des redécouvertes ou réconciliations par exemple. « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ». L’affection, la confiance et l’estime mutuelles - tout comme notre désir et notre complicité intellectuelle, s’approfondissent, s’enrichissent et se redéfinissent en adéquation avec les différentes périodes de notre vie individuelle et de couple.

Conclusion

L’amour n’est donc pas un sentiment simple, dont on trouverait un modèle unique et qui vaudrait pour tous. L’amour idéal, accompli, n’est pas non plus une norme, à l’aune de laquelle il faudrait dénigrer les autres formes d’amour, ou culpabiliser parce qu’on n’y accède pas. La leçon à retenir de cette vision de l’amour est en effet qu’on peut aimer de différentes manières, et que chaque manière d’aimer vaut le détour. Cette vision de l’amour nous fait également prendre conscience que l’amour accompli, total, est à la fois rare et un défi à relever sur le temps long, qui demande une véritable volonté et capacité à communiquer et à se réinventer à deux.

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